12.02.24
Aujourd'hui, plus de 30 syndicats et organisations de la société civile soutiennent la demande des députés européens de priver les lobbyistes d'Amazon de leur accès au Parlement.
Le 5 février, les députés de la commission de l'emploi du Parlement européen ont envoyé une lettre officielle à la Présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, demandant le le retrait des badges de lobbying aux représentants du géant technologique, leur interdisant ainsi l'accès aux couloirs du Parlement.
Cette action décisive fait suite au refus d' Amazon de s'engager avec le Comité de l'emploi sur des questions cruciales concernant les conditions de travail dans ses entrepôts. Amazon a décliné une invitation à participer à une audition, déclarant que "ce n'était pas un bon jour" pour elle. Amazon est un visiteur fréquent du Parlement européen. Au cours du seul mois de janvier, elle a rencontré neuf députés européens, dont une fois le lendemain de l'audition.
Amazon a déjà a refusé de témoigner lors d'une précédente audition en 2021, et après que l'entreprise ait annulé une visite d'une délégation de députés européens dans ses entrepôts en Allemagne et en Pologne prévue pour décembre 2023. Le jour même de l'audition, Amazon a également été condamnée à une amende de 32 millions d'euros pour la surveillance "excessivement intrusive" des travailleurs dans ses entrepôts en France, soulignant l'exploitation des conditions de travail.
Aujourd'hui, une coalition de plus de 30 syndicats et groupes de la société civile soutient la demande des députés européens dans une lettre ouverte à la présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, exprimant ses profondes inquiétudes quant à l'attitude dédaigneuse d'Amazon à l'égard des contrôles démocratiques et des syndicats, associée à ses investissements substantiels dans les efforts de lobbying.
La lettre affirme que "le mépris d'Amazon pour les institutions démocratiques de l'UE ne devrait pas permettre à l'entreprise de s'en tirer à bon compte". Les signataires, qui comprennent de grandes fédérations syndicales européennes telles que UNI Europa, les organismes de surveillance des lobbies Corporate Europe Observatory et Lobby Control, ainsi que des ONG enquêtant sur le pouvoir des entreprises telles que SOMO, demandent à Metsola "d'appliquer l'article 123 du règlement intérieur du Parlement européen et d'exiger le retrait immédiat de tous les badges de lobbying de l'entreprise".
Les chiffres de LobbyFacts.eu montrent que, depuis 2013, Amazon a alloué un montant stupéfiant de 18,8 millions d'euros au lobbying institutions européennes, ce qui montre l'engagement de l'entreprise à influencer les décisions politiques. En outre, Amazon emploie actuellement quatorze lobbyistes accrédités par le Parlement européen.
En outre, une plainte officielle déposée par CEO, LobbyControl et SOMO a déclenché une enquête du secrétariat du registre de transparence sur les irrégularités entourant l'enregistrement d'Amazon. Les allégations portent notamment sur des affiliations non divulguées avec divers groupes de réflexion et sur un budget de lobbying potentiellement sous-estimé. Le 8 février, le Médiateur européen a "demandé au Secrétariat du Registre de Transparence de l'UE d'effectuer des enquêtes plus approfondies et plus significatives lorsqu'il s'agit de plaintes publiques concernant des violations présumées du code de conduite par des organisations enregistrées".
La pression croissante exercée sur Amazon s'inscrit dans le cadre d'une campagne plus large menée par la campagne " Make Amazon Pay", qui a mobilisé des grèves et des manifestations dans plus de 30 pays. Le vendredi noir 2023, des travailleurs de quatre pays se sont rassemblés pour tenir un piquet de grève international à l'entrepôt d'Amazon à Coventry, au Royaume-Uni. Cette semaine, les 13, 14 et 15 février 2024, plus de 1 000 travailleurs de Coventry devraient à nouveau se mettre en grève pour réclamer une augmentation de salaire à 15 livres sterling de l'heure et la fin des pratiques antisyndicales de l'entreprise. Les antécédents du conglomérat, entachés d'allégations de pratiques d'exploitation de la main-d'œuvre, de violations des lois antitrust, d'évasion fiscale et de négligence environnementale, ont suscité de vives critiques de la part de groupes de défense des droits dans le monde entier.
Oliver Roethig, UNI Europa Secrétaire régionalLe secrétaire régional de la Commission européenne, M. Oliver Roethig, déclare : "Amazon traite nos parlements, nos institutions démocratiques, comme ses employés : avec mépris. C'est pourquoi nous nous félicitons que les membres du Parlement européen aient pris une mesure concrète pour interdire aux lobbyistes d'Amazon d'entrer au Parlement. En traçant une ligne rouge claire, ils affirment que le comportement antidémocratique d'Amazon ne sera pas toléré, que ce soit à l'égard des syndicats ou des parlements."
Bram Vranken, chercheur et militant du Corporate Europe Observatoryajoute : "Alors qu'Amazon investit massivement dans le lobbying en Europe, l'entreprise fait preuve d'un mépris total pour le contrôle démocratique de son modèle d'entreprise exploiteur. Nous ne devrions pas permettre à l'entreprise de s'en tirer à bon compte et de retirer immédiatement tous ses badges de lobbying."
Margarida Silva, chercheuse à la SOMOajoute : "Amazon est l'une des plus grandes entreprises opérant en Europe et exerce un pouvoir immense sur les petites entreprises et les travailleurs. Ces dernières années, elle a également intensifié ses activités de lobbying auprès des décideurs politiques de l'UE. Pourtant, l'entreprise a rejeté tout contrôle parlementaire, même minime, sur ses activités. C'est un affront à la démocratie".
Max Bank, militant de LobbyControlconclut : "Il est irrespectueux de ne pas assister à une audition parlementaire. Cela doit avoir des conséquences pour Amazon. Le retrait des badges de lobbying de l'entreprise est le bon signal. Quiconque se comporte de manière irrespectueuse envers le Parlement ne mérite pas non plus d'y être entendu".
La position collective des syndicats et des organisations de la société civile souligne l'urgence de tenir les entreprises responsables de leurs actes. Enfin, elle réaffirme l'engagement à défendre les principes démocratiques au sein du Parlement européen.
Le Faire payer Amazon est une coalition de plus de 80 syndicats, organisations de la société civile, écologistes et organismes de surveillance fiscale. Elle a organisé des grèves et des manifestations dans plus de 30 pays.
Lire l'intégralité de la lettre ouverte ci-dessous :
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